lundi 19 mai 2014

Imagine...Phèdre

"Je le vis je rougis, je pâlis à sa vue
Un trouble s'éleva de mon âme éperdue
Mes yeux ne voyait plus
Je ne pouvais parler
Je sentis mon corps et transir et brûler"

Phèdre et Hippolyte, 1815, Baron Guérin, Musée du Louvres
Grande amoureuse tragique de la mythologie grecque, je choisi de vous présenter Phèdre sous les traits que lui donna Racine, plus complexe, plus faible et plus forte, en un mot plus humaine que le personnage originel d'Euripide, auteur grec du Vème siècle avant notre ère.
La pièce:
Écrite et présentée par Jean Racine en 1677, Phèdre est une tragédie en vers de cinq actes. Racine s'inspire de la pièce "Hippolyte porte couronne" d'Euripide (428 av JC) mais articule l'action autour du personnage de Phèdre dont il fait une femme responsable, passionnée, sensuelle.
Phèdre est la fille de Minos et de Pasiphaé, celle ci coupable d'avoir trompé Minos avec un taureau, engendrant ainsi le Minotaure, a subit les foudres d'Aphrodite qui se tournent désormais vers sa fille. Phèdre épouse Thésée, roi d’Athènes dont elle a deux fils. Elle tombe sous le charme d'Hippolyte au premier regard, et essaye dans un premier temps de l'éloigner d'elle et de s'en faire haïr.

 Poterie représentant Aphrodite, 470 av.JC
Hippolyte décide de fuir à la fois sa belle mère qu'il n'aime pas et Aricie, dont il est amoureux mais qui est la dernière survivante d'une famille rivale de Thésée. Cependant Thésée rappelle Hippolyte pour veiller sur Phèdre et ses enfants alors qu'il part en expédition guerrière. Plus tard Thésée est présumé mort, Phèdre se sent libre d'avouer son amour à Hippolyte qui la rejette au profit d'Aricie.  Folle de jalousie devant Thésée revenu elle l'accuse d'avoir tenté de la séduire. Thésée bannit Hippolyte et appelle de ses vœux la vengeance de Neptune.
Rongée de remords, elle se dénonce à Thésée avant de se donner la mort.

Dame de Mycène, 1300 av JC
Le personnage:
Femme pleine d'orgueil, amoureuse passionnée, sensuelle, mère, noble, cruelle et courageuse, les adjectifs se succèdent sans pouvoir cerner définitivement le personnage de Phèdre.
 
Phèdre amoureuse d'Hippolyte est doublement coupable aux yeux de la société, tant pour les grecs antiques que pour la société du XVII° siècle, car ses sentiments relèvent à la fois de l'adultère et de l'inceste bravant ainsi l'interdit fondateur de la civilisation. Racine explore la psychologie de cette femme tourmentée qui lutte d'abord contre la culpabilité d'une passion, malédiction d'Aphrodite, avant de s'y abandonner pour son plus grand malheur car elle ne supportera pas qu'à la blessure d'un amour interdit s'ajoute celle d'un amour-propre bafoué.

 "Les Dieux m'en sont témoins, ces Dieux qui dans mon flanc
Ont allumé le feu fatal à tout mon sang
Ces Dieux qui se sont fait une gloire cruelle
de séduire le cœur d'une faible mortelle"

Le personnage tout entier est tourné vers l'idée de mort, avant même l'acte irrémédiable, elle cesse de s'alimenter et devient de plus en plus faible. Seuls ses devoirs de mère arrivent à la soutenir encore ainsi que le soin de sa nourrice. Une fois que toute la tragédie est consommée la faute ne peut être lavée que dans la mort. 

"Et la mort, à mes yeux dérobant la clarté,
Rend au jour qu'ils souillaient toute sa pureté"

Phèdre princesse antique
Racine s'inspire pour sa pièce, de la tragédie d'Euripide datant de 428 avant JC, celle ci relatant des faits de la période archaïque des rois d'Athènes et de la conquête de l'Attique soit du VIII° siècle avant notre ère. Mais si l'on privilégie les éléments mythologiques dans l'interprétation historique, les faits se situent au XII° siècle av JC, au moment ou Thésée réunit les tribus athéniennes en une seule entité et affranchit Athènes de la tutelle crétoise. Pour imaginer Phèdre il faut donc se pencher sur l'histoire de la mode entre le XII° et le VIII° siècle avant notre ère, en Crète et en Grèce.

Phèdre princesse Crétoise
"Déesse aux serpents" faïence minoenne, -1600av JC
Le costume crétois fait figure d'exception dans l'histoire du costume antique. D'une part il est le premier a avoir fait une distinction nette entre les sexe, et par ailleurs il est le premier vêtement cousu de l'Histoire. Les vêtements sont de laine ou de lin, teintés de pourpre, de bleu de brun ou de jaune, avec jusqu'à 4 teintes pour une même pièce. Certaines sources attestent la présence de motifs de fleurs, de ramages ou encore d'oiseaux.

 Sarcophage Aghia Triada, -1400av JC
Phèdre aurait ainsi été parée d'une jupe en cloche constituée de plusieurs couches de volants allant jusqu'à terre. L'étoffe peut être confectionnée à partir d'un grand nombre de bandes horizontales brodées ou non, de galons rajoutés. Un tablier arrondi recouvre le haut de la jupe. La poitrine est laissée découverte par le corsage qui s'ouvre sur la taille, remonte dans le cou formant un col "Médicis", les manches sont courtes et peuvent être bouffantes, reliées au cou par un jeu de noeuds. Le costume de cour se complète d'une chemisette transparente comme sur la représentation ci-dessous.
"La parisienne" Cnossos, - 1500 av JC
La taille est soulignée par une ceinture ou par un corset, première pièce de l'histoire de la mode à appliquer la métallurgie au costume. Enfin, un manteau long ou une pèlerine venait compléter la tenue pour sortir. La chevelure est nattée, mais ce qui rend exceptionnelles les coiffures de la Crète antique c'est l'usage de chapeaux aux formes variées. Enfin le cou, les bras la coiffure et les oreilles  sont parés de bijoux en or avec des cristaux de roche, du lapis lazuli, des perles, des agates, des améthyste.

Parure de tête du Trésor de Priam, exposé à la BNF

Phèdre, reine d'Athènes

En épousant Thésée, Phèdre s'est très certainement défait de ses habitudes vestimentaires crétoises, pour correspondre à son rang d'épouse d'un Roi athénien, adoptant ainsi le costume grec. Les tissus sont les même qu'en Crète, l'importation de soie pour les plus aisés est largement répandue. Généralement nos contemporains se figurent l'individu antique enveloppé dans des draps blancs, image renforcée par le fait que les statues nous sont parvenues le plus souvent totalement blanches. Hors, il n'en est rien, l'étude de korês profondément enfouies (statues représentant des jeunes femmes) montre l'usage d'une polychromie étendue. Tout comme en Crète, la couleur, le tissage sont utilisées et constituent un indicateur du rang social de l'individu qui les revêt. Les galons aux motifs de vagues stylisées semblent être les plus appréciés.

Korê de Chios, 520 av JC
La grande différence entre les deux costumes que va revêtir Phèdre au cours de sa vie, réside dans le fait que l'un est cousu et l'autre est drapé. En effet l'élégance grecque tient dans le drapé d'une pièce d'étoffe rectangulaire, qui n'est à aucun moment taillée pour s'adapter au corps mais qui est disposée et retenue au moyen de fibules, bijoux totalement absent du vestiaires crétois. On ne distingue donc pas des coupes mais des façons d'ajuster:
- Pallium: l'étoffe enveloppe le corps sans être fixée
- Chlamyde: deux des coins sont liées au niveau du cou au moyen d'une agrafe

Korê, Acropolis, 530 av JC
- Peplos: une robe est formée au moyen de plusieurs agrafes ou fibules au niveau des épaules, puis ceinturée.


 Korê, 580 avJC
La tunique cousue aux épaules, ou khiton, n'est mentionnée qu'à partir de -558 av JC, il est donc peu probable que Phèdre s'en soit vêtue. Les couleurs les plus usuelles sont le violet, le vert et le gris. Quant à la coiffure de Phèdre en tant que reine athénienne elle a pu être variée, boucles laissées libres, tresses, chignon, on peut même envisager qu'elle ait gardé ses habitudes crétoises.

Fresque de Knossos


1 commentaire:

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