"Je le vis je rougis, je pâlis à sa vue
Un trouble s'éleva de mon âme éperdue
Mes yeux ne voyait plus
Je ne pouvais parler
Je sentis mon corps et transir et brûler"
Phèdre et Hippolyte, 1815, Baron Guérin, Musée du Louvres
Grande amoureuse tragique de la mythologie grecque,
je choisi de vous présenter Phèdre sous les traits que lui donna
Racine, plus complexe, plus faible et plus forte, en un mot plus
humaine que le personnage originel d'Euripide, auteur grec du Vème
siècle avant notre ère.
La pièce:
Écrite et présentée par Jean Racine en 1677,
Phèdre est une tragédie en vers de cinq actes. Racine s'inspire de
la pièce "Hippolyte porte couronne" d'Euripide (428 av JC)
mais articule l'action autour du personnage de Phèdre dont il fait
une femme responsable, passionnée, sensuelle.
Phèdre est la fille de Minos et de Pasiphaé, celle
ci coupable d'avoir trompé Minos avec un taureau, engendrant ainsi
le Minotaure, a subit les foudres d'Aphrodite qui se tournent
désormais vers sa fille. Phèdre épouse Thésée, roi d’Athènes
dont elle a deux fils. Elle tombe sous le charme d'Hippolyte au
premier regard, et essaye dans un premier temps de l'éloigner d'elle
et de s'en faire haïr.
Poterie représentant Aphrodite, 470 av.JC
Hippolyte décide de fuir à la fois sa belle mère
qu'il n'aime pas et Aricie, dont il est amoureux mais qui est la
dernière survivante d'une famille rivale de Thésée. Cependant
Thésée rappelle Hippolyte pour veiller sur Phèdre et ses enfants
alors qu'il part en expédition guerrière. Plus tard Thésée est
présumé mort, Phèdre se sent libre d'avouer son amour à Hippolyte
qui la rejette au profit d'Aricie. Folle de jalousie devant
Thésée revenu elle l'accuse d'avoir tenté de la séduire. Thésée
bannit Hippolyte et appelle de ses vœux la vengeance de Neptune.
Rongée de remords, elle se dénonce à Thésée
avant de se donner la mort.
Dame de Mycène, 1300 av JC
Le personnage:
Femme pleine d'orgueil, amoureuse passionnée,
sensuelle, mère, noble, cruelle et courageuse, les adjectifs se
succèdent sans pouvoir cerner définitivement le personnage de
Phèdre.
Phèdre amoureuse d'Hippolyte est doublement
coupable aux yeux de la société, tant pour les grecs antiques que
pour la société du XVII° siècle, car ses sentiments relèvent à
la fois de l'adultère et de l'inceste bravant ainsi l'interdit
fondateur de la civilisation. Racine explore la psychologie de cette
femme tourmentée qui lutte d'abord contre la culpabilité d'une
passion, malédiction d'Aphrodite, avant de s'y abandonner pour son
plus grand malheur car elle ne supportera pas qu'à la blessure d'un
amour interdit s'ajoute celle d'un amour-propre bafoué.
"Les Dieux m'en sont témoins, ces
Dieux qui dans mon flanc
Ont allumé le feu fatal à tout mon sang
Ces Dieux qui se sont fait une gloire cruelle
de séduire le cœur d'une faible mortelle"
Le personnage tout entier est tourné vers l'idée
de mort, avant même l'acte irrémédiable, elle cesse de s'alimenter
et devient de plus en plus faible. Seuls ses devoirs de mère
arrivent à la soutenir encore ainsi que le soin de sa nourrice. Une
fois que toute la tragédie est consommée la faute ne peut être
lavée que dans la mort.
"Et la mort, à mes yeux dérobant la clarté,
Rend au jour qu'ils souillaient toute sa pureté"
Phèdre princesse antique
Racine s'inspire pour sa pièce, de la tragédie
d'Euripide datant de 428 avant JC, celle ci relatant des faits de la
période archaïque des rois d'Athènes et de la conquête de
l'Attique soit du VIII° siècle avant notre ère. Mais si l'on
privilégie les éléments mythologiques dans l'interprétation
historique, les faits se situent au XII° siècle av JC, au moment ou
Thésée réunit les tribus athéniennes en une seule entité et
affranchit Athènes de la tutelle crétoise. Pour imaginer Phèdre il
faut donc se pencher sur l'histoire de la mode entre le XII° et le
VIII° siècle avant notre ère, en Crète et en Grèce.
Phèdre princesse Crétoise
"Déesse aux serpents" faïence minoenne, -1600av JC
Le costume crétois fait figure d'exception dans
l'histoire du costume antique. D'une part il est le premier a avoir
fait une distinction nette entre les sexe, et par ailleurs il est le
premier vêtement cousu de l'Histoire. Les vêtements sont de laine
ou de lin, teintés de pourpre, de bleu de brun ou de jaune, avec
jusqu'à 4 teintes pour une même pièce. Certaines sources attestent
la présence de motifs de fleurs, de ramages ou encore d'oiseaux.
Sarcophage Aghia Triada, -1400av JC
Phèdre aurait ainsi été parée d'une jupe en
cloche constituée de plusieurs couches de volants allant jusqu'à
terre. L'étoffe peut être confectionnée à partir d'un grand
nombre de bandes horizontales brodées ou non, de galons rajoutés.
Un tablier arrondi recouvre le haut de la jupe. La poitrine est
laissée découverte par le corsage qui s'ouvre sur la taille,
remonte dans le cou formant un col "Médicis", les manches
sont courtes et peuvent être bouffantes, reliées au cou par un jeu
de noeuds. Le costume de cour se complète d'une chemisette
transparente comme sur la représentation ci-dessous.
"La parisienne" Cnossos, - 1500 av JC
La taille est soulignée par une ceinture ou par un
corset, première pièce de l'histoire de la mode à appliquer la
métallurgie au costume. Enfin, un manteau long ou une pèlerine
venait compléter la tenue pour sortir. La chevelure est nattée,
mais ce qui rend exceptionnelles les coiffures de la Crète antique
c'est l'usage de chapeaux aux formes variées. Enfin le cou, les bras
la coiffure et les oreilles sont parés de bijoux en or avec
des cristaux de roche, du lapis lazuli, des perles, des agates, des
améthyste.
Parure de tête du Trésor de Priam, exposé à la BNF
Phèdre, reine d'Athènes
En épousant Thésée, Phèdre s'est très
certainement défait de ses habitudes vestimentaires crétoises, pour
correspondre à son rang d'épouse d'un Roi athénien, adoptant ainsi
le costume grec. Les tissus sont les même qu'en Crète,
l'importation de soie pour les plus aisés est largement répandue.
Généralement nos contemporains se figurent l'individu antique
enveloppé dans des draps blancs, image renforcée par le fait que
les statues nous sont parvenues le plus souvent totalement blanches.
Hors, il n'en est rien, l'étude de korês profondément enfouies
(statues représentant des jeunes femmes) montre l'usage d'une
polychromie étendue. Tout comme en Crète, la couleur, le tissage
sont utilisées et constituent un indicateur du rang social de
l'individu qui les revêt. Les galons aux motifs de vagues stylisées
semblent être les plus appréciés.
Korê de Chios, 520 av JC
La grande différence entre les deux costumes que va
revêtir Phèdre au cours de sa vie, réside dans le fait que l'un
est cousu et l'autre est drapé. En effet l'élégance grecque tient
dans le drapé d'une pièce d'étoffe rectangulaire, qui n'est à
aucun moment taillée pour s'adapter au corps mais qui est disposée
et retenue au moyen de fibules, bijoux totalement absent du
vestiaires crétois. On ne distingue donc pas des coupes mais des
façons d'ajuster:
- Pallium: l'étoffe enveloppe le corps sans être
fixée
- Chlamyde: deux des coins sont liées au niveau du
cou au moyen d'une agrafe
Korê, Acropolis, 530 av JC
- Peplos: une robe est formée au moyen de plusieurs
agrafes ou fibules au niveau des épaules, puis ceinturée.
Korê, 580 avJC
La tunique cousue aux épaules, ou khiton, n'est
mentionnée qu'à partir de -558 av JC, il est donc peu probable que
Phèdre s'en soit vêtue. Les couleurs les plus usuelles sont le
violet, le vert et le gris. Quant à la coiffure de Phèdre en tant
que reine athénienne elle a pu être variée, boucles laissées
libres, tresses, chignon, on peut même envisager qu'elle ait gardé
ses habitudes crétoises.
Fresque de Knossos
1 commentaire:
trimakasih gan buat infonya,,
sangat menarik,,
saya suka dengan artikelnya,,
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