«Voulant
analyser une crapule, je l'ai développée dans un milieu digne
d'elle, afin de donner plus de relief à ce personnage. J'avais ce
droit absolu comme j'aurais eu celui de prendre le plus honorable des
journaux pour y montrer la vie laborieuse et calme d'un brave homme
(...)»
Guy
de Maupassant
Portrait de Edmond Maitre de Frédéric Bazille
Le Roman:
Bel ami de Guy de Maupassant, publié en 1885 sous forme de feuilletons, retrace l'ascension sociale de Georges Duroy, qui d'employé des chemins de fer atteindra les hautes sphères politique et financière de la société française de la fin du XIX°.
Le personnage:
Georges Duroy est un jeune
homme , 25 ans au début du roman en 1880, sans diplôme, il se
cherche un avenir alors qu'il occupe un modeste emploi de bureau
après un engagement en Algérie dans les hussards.
Au Moulin Rouge, Toulouse Lautrec
Il
se montre bien souvent naïf et peu sûr de lui à chaque découverte,
lors de sa première conquête féminine, lors de ses débuts dans le
journalisme, lors de ses premières spéculations financières, mais
il apprend vite!
Portraits à la bourse, Edgard Degas
Seule
exception l'écriture pour laquelle il a peu de dons comme l'indique
la difficulté qu'il éprouve à rédiger ses articles et l'aide dont
il a besoin et que lui accorde Mme FORESTIER.
Il
subit aussi les conditions de son époque, violente avec ses
guerres européennes ( la défaite de la France face à l'Allemagne
en 1870 , sociales ( La Commune de Paris) ou coloniales en Afrique et
en Asie, cynique avec l'adultère mondain, les alliances politiques
changeantes et les spéculations financières qui s'inscrivent dans
les débuts difficiles de la République laïque !
Quoi
de mieux que les milieux de la presse parisienne, en plein essor
,pour aborder ces différents aspects?
Cercle de la rue Royale, James Tissot
Bel
Ami découvre par les femmes sa force de séduction , comme le
montrent les premières conquêtes bourgeoises, avant d'en user (avec
sa première maîtresse qui finit par l'entretenir) puis de
l'utiliser dans sa promotion professionnelle et sociale ( avec
Madeleine puis Mme Walter la femme de son patron) pour un but
toujours identique: l'argent pour le pouvoir! Toujours plus d'argent
et d'influence.
Chez le père Lathuille, Edouard Manet
L'intelligence
lui vient avec le succès , associant séduction et ruse!
Le costume:
- l'employé
de bureau «au chapeau à haute forme assez défraîchi»,ayant
récemment quitté l'uniforme des hussards mais aux postures
marquées par sa période militaire «comme il portait beau par
nature et par pose d'ancien sous officier, il cambra sa taille,
frisa sa moustache d'un geste militaire et familier»
Café concert, Edouard Manet
«Il
marchait ainsi qu'au temps où il portait l'uniforme
des hussards, la poitrine bombée, les jambes un peu
entre ouvertes comme s'il venait de descendre de cheval ; et il
avançait brutalement dans la rue pleine de monde, heurtant les
épaules, poussant les gens pour ne point se déranger de sa route.
Il inclinait légèrement sur l'oreille
son chapeau à haute forme assez défraîchi,
et battait le pavé de son talon.»
- le
journaliste débutant qui loue son premier habit
Gustave Caillebotte dans un café
«Il
était un peu gêné, intimidé, mal à l'aise. Il portait un habit
pour la première fois de sa vie, et l'ensemble de sa toilette
l'inquiétait. Il la sentait défectueuse en tout, par les bottines
non vernies mais assez fines cependant, car il avait la coquetterie
du pied, par la chemise de quatre francs cinquante achetée le matin
même au Louvre, et dont le plastron trop mince se cassait déjà.(...)
Son pantalon ,un peu trop large, dessinait mal la jambe, semblait
s'enrouler autour du mollet, avait cette apparence fripée que
prennent les vêtements d'occasion sur les membres qu'ils recouvrent
par aventure. Seul l'habit n'allait pas mal, s'étant trouvé à peu
près juste pour la taille»
- le
responsable de la rubrique politique ayant épousé Madeleine ,
veuve Forestier qui tient salon parisien, recevant journalistes et
hommes politiques, qui se fait appeler DU ROY
Jours pluvieux place de l'Europe, Gustave Caillebotte
- après un séjour dans son village avec Suzanne Walter, qu'il séduit «Georges, vêtu d'une vareuse achetée toute faite chez un commerçant du pays, promenait Suzanne, soit à pied, le long des berges, soit en bateau.»
Excursion en bateau, Gustave Caillebotte
- le spéculateur sur les titres de la dette coloniale et fin comploteur qui fera tomber l'amant de sa femme lors d'un constat d'adultère, ce qui lui permet de négocier son mariage avec la riche famille Walter il devient le baron Georges Du Roy de Cantel après avoir épousé Suzanne Walter en 1883, en l'église de La Madeleine.
Théo Van Rysselberghe, portrait d'Octave Maus
Toulouse Lautrec, Monsieur Fourcade
contrairement
à Dorian Gray on imagine un Georges DUROY soucieux d'intégrer la
norme vestimentaire de la classe sociale à laquelle il aspire, avec
la crainte de ne pas être «à la hauteur»
Grand bourgeois plus que dandy, mais jamais très loin d'un
miroir afin d'examiner celui qui fut le fils de pauvres paysans
normands et qui reçoit la Légion d'Honneur avec dédain.
Petit glossaire non exhaustif des attributs masculins du XIX° et des signes extérieurs de richesse:
Landau
Voiture
hippomobile suspendue à quatre roues comportant deux banquettes se
faisant vis-à-vis et une capote formée de deux soufflets s'ouvrant
et se fermant à volonté.
Habit
Vêtement
masculin de dessus, couvrant le haut du corps, à longues basques échancrées par devant.
Plastron:
Partie de
certains vêtements masculins qui recouvre la poitrine; en
particulier. pièce d'étoffe qui recouvre le devant d'une
chemise. Chemise à plastron; plastron blanc, empesé; plastron
d'habit.
Montre à
gousset
gousset:Petite
poche de la ceinture du pantalon, du gilet ou de la veste. Fouiller
dans son gousset; tirer sa montre du gousset.
Canne:
accessoire
viril et élégant de la mode masculine bourgeoise (et non plus
seulement aristocratique), complément indissociable du frac noir et
de la redingote. «Il
est alors aussi incongru à un homme de sortir sans sa canne qu'à
une femme de se promener sans chapeau».
Beaucoup de grands bijoutiers-joaillers se sont investis dès le
XIXesiècle
dans la fabrication de luxueux pommeaux de cannes.
Sans oublier bien entendu le chapeau, les gants et les chaussures dont la qualité et le coût sont des marqueurs d'appartenance sociale.
Pas de cinéma pour finir cette fois ci, mais un apperçu d'un salon chic au XIX° siècle, peint par James Tissot.
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